Ailes blanches, mélodies d’anges et ciel bleu. Je m’en souviens par flashs, quelques fois. Premiers regards, horde d’anges et cette voix qui s’est tue depuis bien longtemps. Encore une vision courte, un instant passé. Vacarme gracieux d’ailes souples, bleu qui vire au rouge, cri d’appel à l’aide et fers qui s’entrechoquent. Raphaël, Gabriel, trop d’ « el », d’ailes. J’en perdais déjà là tête à l’époque, mais le revivre est un calvaire sans fin.
Spasmes de douleur dans le mollet, comme une crampe en plus douloureux, profond. Regard terrifiant d’Adriel, puis rideau.
Et je me relève, me réveille en quelques sortes tout en sachant que je n’ai pas dormi. Les anges ne dorment pas, ne s’assoupissent pas de fatigue. Nous ne connaissons pas la fatigue, juste la lassitude. Même s’il me venait l’idée d’essayer de m’endormir, je n’y parviendrai pas. Comme à l’instant, je reverrai la mort de Dieu, ressentirai mes souffrances passées, ma culpabilité comme une punition que l’éternité s’est vouée à me faire subir.
Deux millénaires bientôt, et par rapport à ce qu’il me reste à affronter ce n’est rien. Des peccadilles. Une seconde à peine d’existences que je sais être bien plus longues. Et pour tout ce temps qu’il me reste à vivre ici, je n’ai aucun Dieu à prier pour une quelconque miséricorde : je n’ai d’ailleurs jamais essayé de m’adresser à lui directement. Honte, orgueil, peur. Je ne sais pas si les anges peuvent seulement prier. Je suppose qu’aucun n’ait déjà tenté d’entrer en contact avec notre Créateur à tous, joignant les mains sur pour quémander son secours divin.
Ce serait tenter le diable.